Le Grand Paris Express est-il déjà obsolète ?
Il y a quelques jours, Jean-Louis Missika, adjoint à la Maire de Paris, chargé de l’urbanisme, annonçait que « le Grand Paris Express sera obsolète au moment d’être livré ». Il évoquait les véhicules autonomes, les modifications qui caractériseront la mobilité en Ile-de-France, les mobilités douces. Le métro est-il alors un moyen de transport dépassé ?
La Cour des comptes dénonce de son côté la dérive des coûts de ce projet pharaonique, qui consiste à réaliser 200 km de nouvelles lignes de métro. En 7 ans, le coût du projet est passé de 19 milliards € à plus de 38 milliards. Face à cette dérive, mais aussi aux engagements dans la perspective des Jeux Olympiques, le Premier Ministre a confirmé le projet mais doit se prononcer en mars prochain sur le calendrier, qui, au moins pour deux des quatre lignes, sera décalé de plusieurs années.
Ce décalage est peut-être une bonne nouvelle afin d’étudier à nouveau, non pas le tracé des lignes, mais son fonctionnement et son utilité.
En effet, ces lignes de métro ont été étudiées, comme au siècle passé, pour transporter des personnes sur un parcours défini. La mobilité dans une agglomération comme celle du Grand Paris ne se limite plus au transport de personnes. En un siècle, elle a changé.
Elle intègre maintenant inévitablement le transport des marchandises, colis, biens de consommation, produits alimentaires, sur l’ensemble du territoire. L’investissement considérable effectué doit intégrer, lors de sa conception, des moyens de transport de marchandises afin de créer des complémentarités et une mutualisation permettant de saturer ces réseaux et de réduire l’impact environnemental. Les gares doivent ainsi être conçues dans ce sens, comme des pôles d’échanges de personnes et de biens. Si les moyens d’acheminement des personnes, de la surface au mode de transport souterrain sont assez simples, il n’en est pas de même pour les marchandises. L’acheminement robotisé des biens dans ces modes de transport est probablement ce qui doit être étudié. Comme la conteneurisation des marchandises, à l’image du réseau suisse Cargo Sous Terrain, en projet entre différentes agglomérations.
Bien sûr, il ne s’agira pas d’engorger encore un peu plus les transports publics aux heures de pointe avec des transports de colis. Mais il s’agira de saturer ce réseau, 24h/24, 7 jours/7, afin d’en faire un outil de la transition énergétique et de réduire les flux de véhicules, voitures, mais aussi camions, dans l’agglomération parisienne.
Cette mutualisation des flux passagers / marchandises n’est pas seulement une perspective. C’est une nécessité afin de faire en sorte que ce nouveau réseau ne devienne pas obsolète dès sa livraison, comme l’annonce déjà Jean-Louis Missika.
Plusieurs techniques peuvent exister afin de mutualiser les flux passagers / marchandises :
Créer des rames spécifiques ou des wagons dédiés aux marchandises. Ces solutions nécessitent des moyens de manutention spécifiques et totalement automatisés afin d’en réduire le temps et le coût. Il s’agit alors de projets de conception de matériel de transport, mais aussi de transitique et de robotisation.
Mais un des axes, probablement assez simple, est d’imaginer des voitures qui, à certains moments, sont équipés pour transporter des passagers et à d’autres des marchandises sous la forme de conteneurs. En sorte un véhicule à double usage en fonction des moments.
Un autre axe de travail est d’insérer au milieu des flux de passagers, des marchandises. On pense bien sûr à des vélos mais il peut aussi s’agir de petits chariots ou conteneurs de transport. Permettre à des livreurs d’utiliser les réseaux de transport public, c’est en fin de compte moins de camions dans les villes et moins de pollution ! Il faut pourtant prévoir la manutention de ces chariots, les contraintes physiques, le poids.
Le Grand Paris Express constitue une formidable opportunité de revoir la mobilité, des personnes, mais aussi des marchandises. Ne passons pas à côté de cet enjeu qui ferait de ce réseau un réseau adapté à son siècle !
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