Jérôme Libeskind s’est penché, au travers d’un ouvrage largement illustré, sur les expériences japonaises en logistique urbaine. Caractérisées par une efficacité de gestion de l’espace public, les villes japonaises peuvent nous aider à construire nos propres modèles. De nombreux aspects sont abordés dans cet ouvrage : centres de distribution urbain, évolution de la consommation et e-commerce, comodalité transport de voyageurs et marchandises, véhicules autonomes et robots, partage de l’espace public, cyclologistique, hotels logistiques. Au-delà des aspects descriptifs, cet ouvrage essaie de comprendre comment le fonctionnement de ce pays, connu pour être un modèle d’efficacité peut nous aider à mettre en oeuvre des solutions innovantes pour les villes européennes. Quelles leçons pouvons-nous tirer de ces exemples d’efficacité ? A télécharger sur la toute nouvelle e-boutique du site Logicités.
Réaliser un ouvrage est à la fois un temps important, une recherche et un investissement. C’est la raison pour laquelle le prix de l’ouvrage en téléchargement pdf est de 16 €. Mon souhait est toutefois de diffuser cette connaissance notamment dans le milieu étudiant. Si certains d’entre vous souhaitent acquérir cet ouvrage mais se heurtent au coût du téléchargement, n’hésitez pas à m’écrire directement sur la page Contact du site www.logicites.fr.
Les études le montrent régulièrement, les livraisons sont effectuées, selon les villes, pour 65% à 75% en dehors des places conçues à cet effet, les aires de livraison.
Et pourtant, ces places sont la plupart du temps disponibles. Là aussi, toutes les études le montrent régulièrement.
Un schéma directeur des places de livraisons peut certainement permettre de gagner quelques points, en positionnant un peu mieux les places. Mais il ne modifiera pas fondamentalement les proportions. Pourquoi ?
Les raisons de ce phénomène sont multiples.
Tout d’abord, le territoire de livraison, du fait notamment de l’e-commerce B to C, s’est étendu à la totalité de la ville. Entre 20 et 25% des flux concernent l’e-commerce et ce taux ne fait qu’augmenter. Les véhicules de livraison doivent donc de plus en plus souvent stationner près des habitations. Les places de livraisons ont logiquement été positionnées près des commerces ou des grands ensembles tertiaires. Les places de livraisons près des habitations sont rares.
Une seconde raison est la dimension des places de livraison. Pour livrer un commerce alimentaire, il faut une place de 12,50 m de long et idéalement 15 m. Or les places disponibles sont souvent trop courtes. Il faut prendre en compte la longueur du véhicule, mais aussi le hayon et un espace permettant au livreur de décharger les marchandises en toute sécurité.
Les places sont parfois squattées ou grignotées. Il s’agit parfois de véhicules utilitaires (camionnette) qui restent stationnés de nombreuses heures, voire toute la journée, ou bien sûr de voitures individuelles. Or une place de livraison est une place dédiée à une fonction dont la durée est en général très courte (en moyenne 12 minutes).
Une autre raison, plus complexe, est la compatibilité de l’espace urbain avec la livraison. Disposer d’une place de livraison près d’un destinataire est, dans certains cas, insuffisant pour permettre au livreur de livrer rapidement et en toute sécurité. Il doit y avoir une planéité de l’espace permettant de faire rouler des rolls ou un transpalette jusqu’au point final. Des trottoirs ou obstacles physiques comme des pistes cyclables, sont des contraintes qui compliquent la tâche du livreur. Logiquement, le livreur va prendre une décision de stationnement en fonction de la charge de livraison et de la facilité qu’il aura à transférer cette charge vers le point final.
Face à ce constat, quelles sont alors les solutions ?
La première solution est de supprimer totalement les places de livraison en créant des quartiers piétons. Toutes formes de mobilités sont alors admises dans cet espace, avec des réglementations horaires. Les livraisons peuvent être réalisées le matin, période en général peu contraignante pour les piétons. De nombreuses villes anglaises sont organisées de cette façon, avec un certain succès.
Une autre forme de suppression des places est de transformer des espaces, voirie ou trottoirs, en espaces partagés en fonction des horaires de la journée. Ainsi, une avenue avec un large trottoir peut accepter, le matin, de recevoir sur une partie de la largeur des véhicules de livraison. Dans d’autres cas, un véhicule pourrait être « à cheval » entre le trottoir et la voirie, de façon organisée. L’analyse fine de la géographie des voies de circulation est alors nécessaire.
Une autre solution est de transformer ces espaces en espaces intelligents. Des capteurs ou caméras permettent de repérer les véhicules « squatters » et de donner des informations au livreur sur la disponibilité à partir d’applications mobiles. La Ville de Cannes met en place ce type d’équipement permettant d’augmenter la disponibilité des places et de mieux verbaliser.
capteur
La solution la plus pérenne est sans aucun doute de réduire la place de la voiture dans la ville. La livraison des commerces et des habitants est une fonction indispensable à la vie de la ville. Il est bien sûr possible de livrer certains commerces la nuit ou de développer des consignes et points relais pour réduire le nombre de livraisons, mais ces solutions ne seront que partielles. Les pays comme le Japon ou les Pays-Bas, qui ont réduit la place de la voiture parviennent à apporter aux autres formes de mobilité, dont la mobilité des marchandises, plus de fluidité.
La rareté de l’espace public urbain, alors que de nouvelles formes de mobilité douce se développent dans les villes, nécessite de repenser son partage en privilégiant les fonctions indispensables à la ville et durables. La livraison des marchandises en est une, même si son optimisation est nécessaire pour en réduire l’impact.
https://logicites.fr/wp-content/uploads/2018/10/livraison1.jpg11771619Jérôme Libeskindhttps://www.logicites.fr/wp-content/uploads/2015/07/logo_website.jpgJérôme Libeskind2018-10-17 07:17:412018-10-17 07:17:41Espace public urbain : faut-il supprimer les places de livraison ?
Le 8 juin dernier, la ministre des transports Elisabeth Borne annonçait les grandes lignes d’un Xième plan de relance du fret ferroviaire. La logistique urbaine n’est pas absente du dispositif. La ministre indiquait : « Il n’y a pas de logistique urbaine sans fret ferroviaire ».
Cette phrase choc, reprise par la presse, interpelle et mérite une analyse plus approfondie.
Revenons d’abord à l’histoire.
Le premier entrepôt embranché fer date de 1830, il y a donc près de 200 ans. C’est à Manchester que le premier entrepôt au monde, directement approvisionné par la voie ferrée, a été réalisé. Il utilisait la toute nouvelle ligne ferroviaire reliant le port de Liverpool à Manchester. Cette ligne était d’ailleurs la première ligne ferroviaire interurbaine au monde. Il s’agit de l’entrepôt d’une usine de filage de coton, qui a fait la fortune de Manchester, était approvisionnée en coton importé provenant du port de Liverpool.
premier entrepôt embranché fer de Manchester
Cet entrepôt, contrairement à de nombreux sites ferroviaires français, régulièrement détruits, à été conservé et transformé en musée des sciences et des techniques. Il fait partie de l’histoire de la logistique urbaine et du patrimoine logistique.
site de La Chapelle en cours de destruction
Près de 200 ans après, les techniques ont finalement assez peu évolué. C’est peut-être là un des problèmes du ferroviaire. Globalement, le fret ferroviaire en France est en 2017 au niveau des chiffres enregistrés… en 1923. Il représentait en 2017 moins de 10% du transport terrestre de marchandises, hors oléoducs, en tonnes-kilomètres.
intérieur de l’entrepôt de Manchester, en 1924
Pour simplifier, il existe 3 méthodes différentes.
La première méthode se rapproche de celle de 1830, c’est le transport de produits en vrac vers un site, qu’il soit céréalier, pétrolier, chantier de construction. Cela représente l’essentiel du fret ferroviaire, plus exactement 85% du tonnage. Il s’agit de transport de céréales, de produits sidérurgiques, de vrac liquide (produits chimiques, pétroliers), de matériaux de construction. Il peut s’agit de fret urbain, mais toutefois assez rarement.
Le second segment est la conteneurisation, en provenance des ports (containers maritimes) ou de chantiers multimodaux transportant des caisses mobiles (caisses routières). 49 terminaux équipent le territoire français, dont 13 fluviaux, 27 ferroviaires et 9 trimodaux. Nous avons donc 36 terminaux ferroviaires en France. Le transport combiné rail route a lui aussi perdu des parts de marché. Il correspondait en 2008 à 9,2 milliards de tonnes-km et en 2016 à seulement 7,5 milliards. Le transport combiné, moins important en France que dans certains autres pays, correspond pour plus de 80% du trafic au transport de conteneurs au départ des ports, notamment du Havre et Marseille. Il y a un vrai enjeu de logistique urbaine à maintenir et développer des chantiers de transport combiné dans les agglomérations, comme c’est le cas avec le dernier terminal de La Chapelle, construit par Sogaris, mais les obstacles restent énormes : fiabilité du service, qualité des sillons, coût et surtout concurrence avec la route, qui est soumise à bien peu de contraintes.
Le troisième segment est celui des autoroutes ferroviaires. Il ne s’agit alors pas de manutention de caisses, mais d’engins routiers complets, avec ou sans la cabine. Cette technologie est celle utilisée pour le franchissement d’obstacles physiques : les Alpes, la Manche. Elle a été développée sur des longues distances comme la ligne Perpignan-Luxembourg, qui fonctionne très bien, ou plus récemment Calais-Turin. Le potentiel de développement des autoroutes ferroviaires sur des trajets internationaux est important, afin de réduire le nombre de camions en transit. En milieu, urbain, même si cela avait été envisagé à l’origine pour La Chapelle, cela semble complexe.
Avec près de 200 ans d’histoire, le fret ferroviaire va se retrouver avec de nouveaux concurrents, qui risquent de mettre à mal les tentatives semble-t-il inépuisables, de planifier un retour de trafic.
Tout d’abord le fluvial. Nous l’avons oublié car c’est bien dans l’histoire le mode ferroviaire qui a détrôné le fluvial. Si le CSNE est finalement réalisé, ce que l’on ne peut que souhaiter, le fluvial retrouvera ses lettres de noblesse et permettra de réduire le nombre de camions sur les routes. Le mode fluvial est loin d’être saturé et permet, dans de nombreuses agglomérations, comme Paris ou Lyon, d’arriver en centre-ville.
Mais la principale concurrence du ferroviaire sera sans nul doute … la route. Les technologies à venir de platooning, de véhicules autonomes, de route « intelligente » et dotée d’énergie électrique, de charge par induction ou par caténaire, donneront alors à la route une pertinence environnementale nouvelle.
Nous pouvons imaginer que les autoroutes retrouvent une utilisation nouvelle avec des voies réservées, alimentées en énergie électrique, par le dessus ou le dessous. La route sera peut-être solaire et donc elle-même productrice d’énergie.
Le mode ferroviaire, très rigide et souvent saturé, ne supportera alors pas la concurrence face à une route redevenue propre et apportant une souplesse d’utilisation.
Dire qu’il n’y a pas de logistique urbaine sans fret ferroviaire semble alors un peu présomptueux et heureusement inexact. De nombreuses solutions, peut-être plus faciles à mettre en œuvre que le mode ferroviaire existent : consolidation des flux, fluvial, livraison en modes doux, livraison de nuit, comodalité avec les transports publics, espaces logistiques de proximités… et évidemment le mode fluvial. Le mode ferroviaire peut correspondre à une des solutions mais les exemples montrent que les solutions ferroviaires ne sont pas les plus simples à mettre en oeuvre.
L’évolution rapide des technologies laisse penser qu’une nouvelle révolution des transports s’annonce. Dans quelques décennies, les sites ferroviaires marchandises deviendront alors peut-être des musées…en espérant que nous en conservions quelques uns pour ma mémoire de l’histoire des transports et de notre patrimoine.
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