Quand on parle délocalisation, difficulté d’usine française, disparition des centres-villes au profit de zones commerciales périphériques, il y a toujours un grand absent, le transport.
Fabriquer plus loin, acheter plus loin, c’est d’abord générer plus de transport, des longs trajets en conteneur maritime, en camion à travers l’Europe, des trajets en voiture individuelle.
Les importations françaises continuent à augmenter fortement. En 2016, la croissance des importations a été de 3,7% après un bond de 6,4% en 2015. [1]
La vacance commerciale dans les villes augmente d’un point ou deux par an. Elle est aujourd’hui supérieure à 10% et atteint 25% dans certaines villes françaises.
Au-delà des bruits de bottes, de mégaphone, d’accusation de l’Europe, de la mondialisation, nous pouvons nous interroger sur le rôle de chacun.
Le rôle de l’Etat est certes de préserver l’équilibre des territoires, des centres villes, des entreprises. Il est aussi d’agir sur la santé publique des habitants. Les transports sont, nous le savons, fortement contributeurs d’émissions de Gaz à Effet de Serre, mais aussi, en particulier en milieu urbain, de pollution locale (particules fines, Oxydes d’Azote), d’embouteillages, de bruit, d’accidentologie. Les seules particules fines que nous respirons dans les villes françaises sont responsables de 48 000 morts prématurées.[2]
La responsabilité de l’Etat est donc d’inciter les entreprises à maîtriser les flux de transport. C’est possible à grande échelle, pour ce qui concerne les délocalisations, en faisant supporter au générateur de flux les coûts environnementaux et sociaux induits par ces transports. L’écotaxe était une réponse possible, même partielle. Elle a été abandonnée. D’autres réponses pourraient être proposées.
Mais n’attendons pas tout de l’Etat ! Les effets des décisions de l’Etat sont trop peu efficaces dans ces domaines et toujours très longues. Le consommateur a un rôle essentiel qu’il ne faut pas négliger.
Acheter responsable, c’est acheter près de chez soi, dans des commerces de proximité, lorsqu’ils existent encore. C’est aussi préférer des vêtements fabriqués en France, éventuellement au Maroc, plutôt que des vêtements Primark fabriqués au Bangladesh dans des conditions sociales désastreuses.
Le cas de l’entreprise Labonal, fabricant bien connu de chaussettes, est édifiant. Entreprise qui peine à sortir d’une délocalisation, basée sur des prix de plus en plus bas, elle s’oriente vers la qualité en fabricant français. Sa mise en redressement judiciaire est là pour montrer que rien n’est simple. La responsabilité du consommateur est énorme. C’est à lui de soutenir cette entreprise, d’accepter de payer 12 € une paire de chaussettes.
Concernant Whirpool, là encore, rien n’est à attendre de l’Etat. Par contre, le consommateur peut choisir d’acheter des machines à laver Whirpool ou d’une autre marque, en fonction de sa sensibilité sur le « nationalisme » économique. Il peut facilement, à lui seul, faire reculer ce groupe, qui trouve en France son 4ème marché mondial, beaucoup plus important que la Pologne.
Les commerces de centre-ville disparaissent. Certes, l’Etat, les maires, les membres des CDAC sont responsables du développement anarchique des zones commerciales périphériques, qui se portent d’ailleurs parfois assez mal… Mais le consommateur aussi. Il a le choix. Rien ne l’oblige à éviter le centre-ville pour se diriger vers des enseignes uniformisées et banalisées.
Preuve de la responsabilité du consommateur, le magazine Que Choisir (mai 2017) vient de publier un reportage sur le sujet « Où sont passés les commerces ? », en citant les exemples d’Albi ou de Châtellerault.
Faute d’Etat responsable, il faudra probablement trouver des consommateurs responsables pour que l’emploi perdure dans les entreprises françaises.
[1] Source Insee
[2] Source Agence Européenne de l’air