Il est grand temps de rappeler quelques anniversaires qui ont marqué l’année 2014 et concernent la logistique.

2014, c’est d’abord pour nous logisticiens l’anniversaire de l’épisode des 600 taxis de la Marne, réquisitionnés par Gallieni en septembre 1914 afin d’acheminer les soldats sur le front. 100 ans plus tard, les taxis restent au cœur de l’actualité. Leur modèle est mis à mal par de nouvelles formes de mobilités : Uber, créé en 2010, le covoiturage, l’auto-partage,  bientôt les taxis collectifs…  comme les taxis de la Marne ! Amazon les teste à New York pour le transport de colis. Le législateur ne pourra qu’accompagner un phénomène et empêcher les dérives. Il ne pourra pas aller à l’encontre d’une tendance mondiale.

2014, c’est l’anniversaire des 50 ans du Schéma Directeur d’Aménagement et d’Urbanisme de la région de Paris, dont l’initiative revient à Paul Delouvrier. Ce schéma est un cadre fondateur de l’aménagement de l’Ile de France : les villes nouvelles, les autoroutes, le RER, … mais aussi les installations logistiques et notamment les gares routières, le déplacement des Halles à Rungis. Les projets actuels du Grand Paris et de la rénovation des grandes plates-formes logistiques périurbaines sont à mettre en perspective avec ce schéma fondateur.

2014, c’est les 30 ans du « 48 heures chrono » de la Redoute. En 1984, La Redoute invente l’engagement de livrer en 48 heures en point relais et rembourse le montant de la commande si cet objectif n’est pas atteint. 30 ans après, l’enjeu n’est plus 48 heures, mais le respect de l’engagement. C’est aussi le raccourcissement du délai. Grâce à Deliver.ee, la Fnac livre en « 3 heures chrono ». Amazon innove encore en apportant à Manhattan la livraison en 1 heure sur un choix de 25 000 articles. Boulanger sait livrer le lendemain. Le « 48 heures chrono » fait définitivement partie de l’histoire.

2014, c’est l’anniversaire des 20 ans de la création d’Amazon. Comment pourrions-nous imaginer vivre aujourd’hui sans Amazon ? Même si le modèle social et fiscal fait débat, Amazon a le mérite de faire bouger les lignes. Amazon est e-marchand, mais aussi logisticien, transporteur, et permet aux particuliers de devenir vendeurs. C’est tout un modèle que fait changer Amazon, celui du commerce.

Nous retrouvons là les 4 piliers de la logistique urbaine : la mobilité, l’urbanisme, le commerce et le service au client. Ce sont ces 4 piliers qui permettront, si nous les mettons en œuvre de façon plus respectueuse de l’environnement, de construire la ville de demain. Plus attractive, plus numérique, plus collaborative, et plus propre.

Léon Mougeot

Léon Mougeot

Léon Mougeot, plus connu à son époque pour les « Mougeottes », a été redécouvert par Jean-Louis Debré, qui l’a mis en avant dans son livre « les oubliés de la République ».

Mais Léon Mougeot est également un grand oublié de la logistique urbaine à qui il convient de rendre hommage.

Membre de la gauche progressiste, Léon Mougeot est sous-secrétaire d’état aux Postes et Télégraphes pendant quatre années, entre 1898 et 1902.

En 1899, il fait face à une importante grève des facteurs parisiens. Pour sortir de cette situation, Léon Mougeot décide de mettre en œuvre un vaste programme de modernisation de la Poste.

Une des mesures est la réalisation de boîtes aux lettres en fonte, dénommées « les Mougeottes ». Ces boîtes aux lettres remplacent les boîtes aux lettres en bois. Elles ont la particularité de gérer des informations, le jour et la date de la levée, mais également si cette levée a été effectuée ou pas encore.

Nous sommes déjà à l’heure de l’information.

Passionné de modernisation, il met en place les premiers distributeurs automatiques de timbres-poste.

Léon Mougeot est également un grand défenseur de la Petite Reine. En effet, il met en place un programme d’encouragement à l’achat et l’entretien par les facteurs de bicyclettes, ceci afin de réduire la pénibilité du travail de distribution du courrier.

Enfin, visionnaire, il encourage des essais de motorisation des tournées en véhicules électriques.

Léon Mougeot était sans aucun doute, en peu d’années, un des hommes politiques qui a le plus œuvré dans le sens de l’amélioration de la logistique du dernier kilomètre.

Il nous a également appris qu’un malaise social est parfois le révélateur d’une volonté de changement profond des techniques et des méthodes. Il a su mettre en œuvre ces innovations et restera dans l’histoire comme l’un des grands précurseurs de la distribution moderne du courrier.

La Poste nous montre aujourd’hui, au travers de ses nombreuses évolutions,  qu’un peu plus d’un siècle après Léon Mougeot, une autre mutation se prépare, celle du colis et de la ville.

Alors réinventons les Mougeottes, mais pour les colis !

Hasard des calendriers, deux événements en 24 heures ont pour centre d’intérêt l’utilisation du fleuve pour la logistique urbaine.

La Tribune publie hier un très intéressant titré « En logistique urbaine, la vertu est hors de prix ».

http://www.latribune.fr/blogs/la-tribune-du-grand-paris/20141113tribb8f2e76c9/fret-quand-la-vertu-est-hors-de-prix.html

Grande distribution, approvisionement par un transport route fleuve des Franprix

Cet article, qui comprend une interview de Jérôme Libeskind, explique que les mesures vertueuses prises par certains opérateurs à l’instar de Vert Chez Vous, ne sont pas toujours compensées par des avantages permettant à ces solutions d’être pérennes. Vert Chez Vous a en effet mis en œuvre une solution particulièrement innovante et intéressante sur le plan environnemental. Cependant, rien ne change encore à Paris sur le plan de la réglementation et de son application. Livrer en barge et en cargocycle représente un surcoût. Deux ruptures de charges sont nécessaires, ceci sans tenir comptes des modes de distribution.

Si ces mesures vertueuses ne sont pas compensées par des avantages, soit sur le plan de la circulation, de facilités, de fiscalité et si les opérateurs non vertueux ne sont soumis à aucune règle contraignante, la solution ne peut en aucun cas résister. Vert Chez Vous, même si le projet a été stoppé,  n’abandonne pas et parle déjà d’une barge plus performante. Tant mieux. Il est indispensable que certains opérateurs soient des pionniers et c’est le cas de cette société.

Dans la continuité de cet article, le Cercle pour l’Optimodalité en Europe et le Forum pour l’Investissement Responsable conviaient aujourd’hui Laurent Kamiel, directeur des flux de Franprix. Ce groupe de distribution a mis en œuvre depuis 2012 une solution de distribution d’une centaine de magasins parisiens en utilisant le mode fluvial, de Bonneuil au Port de La Bourdonnais, situé au pied de la Tour Eiffel.

Le résultat est particulièrement probant sur le plan environnemental. Laurent Kamiel a notamment parlé des avantages sur le plan des économies de CO², mais aussi de la congestion. Le partenariat de Franprix avec TK Blue Agency permet de mesure les impacts et de valoriser les avantages pour la société de ces mesures vertueuses.

Franprix souhaite cependant pouvoir optimiser le process (et les coûts) en augmentant les flux sur la barge. La mutualisation de ce moyen de transport avec d’autres opérateurs est une solution envisagée. La capacité existe donc et est quotidienne, entre Bonneuil et le centre de Paris.

Nous voyons qu’au travers de ces exemples, les réalisations pertinentes doivent trouver des solutions de mutualisation et d’optimisation. L’aide des collectivités locales reste indispensable pour pérenniser ces opérations. Ce que nous constatons également, c’est qu’un distributeur peut plus facilement accepter un surcoût qu’un prestataire de transport !