Les informations de l’été nous apprennent que les ministres prennent des vacances, comme nombre de français. Bretagne, Corse, notre Ministre d’Etat en charge de la transition écologique aurait pu choisir Saint-Nazaire, ou plus exactement Saint-Marc-sur-Mer. C’est en effet là qu’en 1953, il y a 65 ans, Jacques Tati trouve le cadre de son film culte.
Les dialogues de ce film sont rares, même inexistants. Juste quelques bribes de phrases simples nous restent en mémoire. « Oh un coquillage… » « les vacances au bord de la mer sont toujours agréables… ». Mais un des rares passages mérite notre attention estivale.
Le voyage à Saint-Nazaire s’effectue en voiture, mais sans prendre l’autoroute. Pour cause, le programme autoroutier français débutait tout juste et n’allait pas jusqu’à Nantes, qui ne sera irrigué par l’autoroute que bien plus tard, en 1981.
Durant ce film, le ministre d’état Durieux, s’adresse aux français sur un sujet tout autre que l’écologie, dont on ne parle pas encore en 1953… et ne désespère pas de « voir les français écarter l’accessoire pour s’unir sur l’essentiel ».
Nous sommes très proches du récent discours de Nicolas Hulot, qui a bien besoin de vacances, non pas pour faire le bilan de la première année de son action. Le Figaro, qui fait le bilan de son action, la résume en un point, pourtant loin d’être négligeable, l’arrêt de l’aéroport controversé de Notre-Dame-des-Landes…
Mais que s’est-il passé un an ?
La planète brûle. Nous nous en rendons compte tous les jours, avec plus de 41° dans le sud de la France. Mais aussi les dramatiques incendies en Californie.
La France décide de relancer le programme autoroutier. L’autoroute A304 dans les Ardennes est inaugurée. L’autoroute A9 à Montpellier est doublée, avec pas moins de 2 fois 6 voies, comme à Los Angeles ! La ministre des transports annonce un grand plan de 700 millions d’investissements dans les nouvelles autoroutes. Deux autres autoroutes au moins sont en débat. Celle du contournement est de Rouen, 41,5 km de nouvelle autoroute déclarée Utilité Publique et la nouvelle autoroute entre Lyon et Saint-Etienne.
Jacques Tati nous rappelle qu’il n’y a pas besoin d’autoroute pour rejoindre nos belles régions françaises, d’ailleurs souvent défigurées par les rubans de bitume, plus que par les éoliennes, qui font à nouveau débat (en France seulement).
Nous avons aussi appris que les territoires qui résistent notamment les centres-villes des villes petites et moyennes sont les villes enclavées. Celles qui sont magnifiquement desservies par les autoroutes souffrent plus que les autres, comme en Lozère. Les autoroutes accélèrent les déplacements, dont permettent le départ des activités économiques, des habitants et favorisent l’étalement urbain. Les habitants habitent de plus en plus loin de leur lieu de travail, générant alors de nouveaux flux et justifiant un doublement des autoroutes, comme à Montpellier… Un cercle infernal. M. Hulot (Nicolas), arrêtez le massacre de la France !
Nous avons aussi appris qu’il n’y a quasiment plus de moineaux à Paris, un des symboles de la capitale, que les vers de terre disparaissent comme les abeilles. La biodiversité est en danger ! M. Hulot, agissez à votre niveau pour obtenir une réduction rapide de l’utilisation des produits chimiques et autres glyphosate ! Comment avez-vous pu accepté que l’on importe 300 000 tonnes d’huile de palme, dont nous connaissons les désastres sur la biodiversité dans les pays producteurs ? Si la France ne montre pas l’exemple, qui le montrera ?
Nous avons appris que la France consomme tous les 10 ans l’équivalent d’un département français en urbanisation. Ne nous étonnons pas des inondations à venir, inévitables… Le projet Europacity, qui vise à consommer les dernières terres agricoles proches de Paris (300 hectares) pour construire une piste de ski dans une bulle, est-il alors raisonnable ? M. Hulot, agissez avant qu’il ne soit trop tard sur ce sujet. Comment parler d’agriculture urbaine alors que nous bétonnons nos dernières terres ?
Nous avons appris que le plan vélo est repoussé. Pourtant, nous savons tous que le développement de la mobilité à vélo, tant pour le transport de personnes que de marchandises, est une solution locale à de nombreux déplacements. La plupart des villes d’Europe ont orienté les investissements publics pour développer ce mode de déplacement, pas encore la France, ou si peu. Même l’Italie, pourtant le symbole du scooter, est passée à la pratique du vélo, comme c’est le cas à Milan.
M. Hulot, vos discours sont justes mais ce n’est pas seulement des discours que nous attendons d’un ministre.
Les vacances sont pour tous un moment de repos, du corps et des idées. Elles constituent un moment de réflexion, de bilan, mais aussi de projets pour les semaines et mois à venir.