Une voie réservée pour les taxis et les bus entre Roissy et Paris. C’est a priori une bonne idée. Permettre à des transports « en commun » de rouler plus vite peut améliorer leur rentabilité et le confort des passagers.
Si cette idée est bonne, sa mise en place dans l’urgence l’est moins.
Elle privilégie en effet les modes de déplacements les plus chers, pas nécessairement écologiques. Les trajets en taxi à 60 ou 80 € ne constituent en aucun cas une offre de transport à la portée de la majorité des franciliens.
La nouvelle voie réservée serait-elle une voie réservée… aux riches ?
Certes, les autobus, cependant bien rares entre Roissy et Paris, bénéficieront de cette voie réservée. Mais a priori seulement les autobus financés par le STIF.
Pourquoi le mode du financement du transport en commun serait un critère d’usage ou non d’une voie réservée ?
Pourquoi interdire l’accès à cette voie aux nouveaux modes de déplacements collectifs comme SuperShuttle, Easybus, Uber Pool, les systèmes d’autopartage, qui apportent une réponse collective à des problèmes de déplacements individuels ?
Mais le plus problématique dans la règle édictée n’est pas là.
La première erreur est de ne pas permettre l’utilisation de cette voie en fonction de critères environnementaux objectifs. Ainsi, un taxi fonctionnant au diesel avec en général un seul passager entre Roissy et Paris bénéficiera de cette voie alors qu’un véhicule électrique n’aura pas ce privilège !
Autre erreur, elle oublie totalement la problématique marchandises. Une fois de plus, la logistique urbaine est la grande oubliée. Pour inciter au développement des technologies propres dans le transport de marchandises, GNV ou électrique, il est indispensable de leur accorder des avantages.
Cette voie réservée constitue une opportunité exceptionnelle pour aller dans le sens de la transition énergétique. En effet, la voie Roissy-Paris est un des principaux axes de distribution urbaine, utilisé quotidiennement par plusieurs dizaines de milliers de véhicules.
La loi sur la transition énergétique à peine votée, est-elle déjà remisée au placard des nombreuses lois environnementales adoptées et vite oubliées ?
Le lobbying des taxis, qui obtiennent gain de cause sur un modèle pourtant unanimement critiqué, serait-il plus fort que le lobbying environnemental et citoyen ?
Mon livre sur la Logistique Urbaine étudie notamment le rôle que peuvent jouer les acteurs publics pour permettre la transition énergétique. Serions-nous ici en face d’un contre-exemple parfait ?
Beaucoup de questions et d’interrogations sur une annonce qui pourrait être impopulaire pour tous, les automobilistes, mais aussi ceux qui aspirent à une véritable transition énergétique.