Archive d’étiquettes pour : cyclologistique

La rentrée, c’est l’occasion de faire le tri dans les mails et les news. Pendant un moment, nos préoccupations n’étaient pas, fort heureusement, dans les posts et news quotidiennes. Nos écrans étaient en pause, au moins une partie de la journée. Mais que s’est-il passé durant cet été pour ce qui concerne la #logistiqueurbaine ? Cet article décrypte les principales informations à ne pas manquer !

La livraison a un prix

C’est probablement une des bonnes nouvelles de l’été. Amazon Prime a annoncé une augmentation de 42% du prix de son abonnement. Cette nouvelle, si elle peut être perçue comme négativement par le consommateur, surtout en période d’inflation, montre que tout ne peut pas être gratuit. Le transport, notamment dans les grandes agglomérations, représente pour les distributeurs un coût important. Les obligations progressives d’équiper les flottes en véhicules propres ont aussi un coût qui sera nécessairement intégré. D’autres distributeurs ont récemment pris des décisions dans ce sens pour facturer les livraisons des retours, par exemple Zara ou H&M.

Dark stores – dark kitchens : l’imbroglio de l’été

Après les annonces fracassantes du mois d’août faisant état d’une légalisation des dark stores sous réserve d’avoir un simple point de retrait, ceci sous la forme d’un décret ministériel, il semble que le discours évolue. Les interventions des nombreux maires, dont ceux de Paris, Nice, Marseille, Lyon, Besançon ou Villeurbanne ont eu pour effet l’annonce (ou le rappel) d’une concertation donc l’objectif est de permettre aux maires de réglementer leur territoire. Il faut probablement se donner le temps d’encadrer ces nouveaux modes de commerce mais aussi d’éviter que ces modes de consommation de livraison instantanée, très critiqués pour leur impact social et environnemental négatif, se développent au détriment de la qualité de vie dans les centres-villes. A l’Etat de prendre la mesure des enjeux. La logistique urbaine vise à mieux consolider les flux et pas à les déstructurer ou les fragmenter.

Et pourtant, certains e-marchands ont compris qu’il faut livrer plus lentement !

Les e-marchands suisses Galaxus et Digitec ont choisi de prendre le contre-pied du quick commerce. Ils proposent dorénavant une option « livraison plus lente ». Le temps permet à l’e-marchand de mieux s’organiser et de lisser son activité. Mais il permet aussi de mieux consolider les livraisons. La livraison la plus lente est alors la plus verte !

Amazon freine ses investissements dans la logistique

Cette annonce concerne pour le moment les Etats-Unis. Fléchissement de l’activité durant le 2ème trimestre, inflation et coûts énergétiques sont probablement à l’origine de cette annonce, qui se traduit pour le moment par un arrêt de la croissance effrénée du parc immobilier de l’entreprise, qui ne l’oublions pas, a connu une très forte progression en 2020. Un sujet à suivre…

La logistique urbaine attire les investisseurs

En nécessitant des surfaces en proximité des centres-villes, la logistique urbaine devient un produit immobilier en tant que tel. Sogaris, opérateur historique sur ce segment, a annoncé durant l’été une levée de fonds de 150 millions € afin d’accompagner son développement.

D’autres acteurs affichent leurs ambitions. Altarea, groupe présent dans l’immobilier commercial, mais aussi le logement et l’immobilier d’entreprise, a annoncé une prise de participation dans Corsalis, qui vient de louer son premier espace logistique urbain parisien, de 4500 m², à La Belle Vie.

La Ville de Paris se dote d’une nouvelle stratégie de logistique urbaine

Après les chartes de 2006 et 2013, la Ville de Paris décide de revoir ses orientations de logistique urbaine. Plusieurs axes sont développés dans cette stratégie, notamment la place de la logistique dans l’espace public parisien et la logistique des chantiers. Cette stratégie 2022-2026 permettra aussi de mobiliser des solutions foncières afin de permettre le développement de solutions de livraison consolidées et décarbonées.

A Strasbourg, Geodis fait le choix de la logistique multimodale

Geodis a finalisé un partenariat avec la startup ULS afin de livrer le centre de la capitale alsacienne en vélocargo. 4 camions seront ainsi remplacés par 17 vélocargos qui assureront la livraison de 15% des flux de Geodis à Strasbourg. Une initiative à suivre !

VNF lance un appel à projets à Toulouse et le trafic progresse sur la Seine

VNF a pris l’initiative durant l’été de lancer un appel à projets afin de trouver un opérateur sur le site fluvial de Lalande, à Toulouse. Fortement soutenu par les initiatives gouvernementales, le fret fluvial retrouve une certaine croissance, notamment sur le bassin de la Seine. Les chiffres publiés par VNF font état d’une croissance en tonnes-kilomètres de 8,2% sur un an. Matériaux de construction, chantiers des Jeux Olympiques, travaux du RER, les initiatives ne manquent pas pour mieux utiliser ce mode de transport massifié.

A Caen, la logistique urbaine est une réalité

La Communauté Urbaine de Caen-la-Mer a lancé un appel à projet afin d’exploiter un espace logistique urbain situé à proximité du centre-ville. Cet appel à projet est la continuité d’une étude de logistique urbaine confiée au groupement Samarcande – Logicités – ELV Mobilités afin d’effectuer un diagnostic logistique de l’agglomération, comprendre son fonctionnement et aboutir à des solutions opérationnelles. Date limite de remise des offres le 13 septembre !

Lille structure son offre d’immobilier pour la logistique urbaine

Le groupe APRC a fait le choix d’investir à Roubaix, sur le site historique de la Lainière, en friche depuis de nombreuses années. Ce site très divisible a pour but de cibler des besoins de livraison du dernier kilomètre pour l’agglomération lilloise. Ce site avait fait l’objet d’une étude pour le compte de la Métropole Européenne de Lille à laquelle Logicités et ELV Mobilités avaient participés.

D’autres projets de logistique urbaine, plus proche de l’hyper centre lillois, apparaissent afin d’accueillir les activités de livraison du dernier kilomètre. Corsalis met ainsi sur le marché un nouvel espace dans le cœur de Lille. Nul doute que cet espace de 2000 m² dans le quartier Moulins, facilement accessible, trouvera rapidement preneur.

Les transporteurs investissent dans des flottes propres

Durant l’été, plusieurs annonces de transporteurs ont marqué l’attention des spécialistes. Le groupe GLS a fait le choix de livrer Bayonne et Biarritz avec un e-scooter Tripl. Ce choix est la continuité du développement d’une flotte décarbonée dans différentes villes, notamment Montpellier et Toulouse. Durant l’été, le groupe Star Service a ainsi annoncé une commande de 200 nouveaux véhicules électriques, majoritairement des e-Jumpy.

Les aides pour l’achat de vélocargos augmentent

Autre bonne nouvelle de l’été, l’annonce par le Ministère de l’Economie de l’augmentation du bonus écologique pour l’acquisition de vélos et notamment vélocargos et remorques. Il est fixé à 40% du prix du vélocargo avec une limite de 1000 €. Une excellente opportunité pour se poser la question de l’utilisation de ce mode de transport de marchandises.

Deux articles de fond à lire absolument 

Le blog Bigmedia publié par BPI France publie un article sur le défi de la logistique verte, pour l’Etat, les entreprises et les consommateurs. Jérôme Libeskind est interviewé à cette occasion. Un autre article à découvrir, celui de l’INRS dans le cadre d’un dossier sur la prévention dans le secteur de la logistique face aux défis de la modernité. Laetitia Dablanc nous fait un état de l’art sur les risques et enjeux de la livraison du dernier kilomètre.

Enfin, et pour terminer ce point de rentrée, certes probablement incomplet, n’oublions pas que de très bonnes idées de logistique urbaine pourront être trouvées dans l’ouvrage publié en 2021 « Si la logistique m’était contée », disponible sur la boutique web de ce site.

3 conférences logistique urbaine seront animées sur la SITL 2022 Paris Nord Villepinte par Jérôme Libeskind.

Le 5 avril à 15, une conférence sur les nouvelles tendances de commerce alimentaire et livraisons urbaines réunira Star Service, Carrefour, Delipop et Califrais / Rungis market.

Cette conférence vise à mieux comprendre les attentes des destinataires en termes de services (particuliers et professionnels) mais aussi de comprendre quels sont les dernières tendances. S’agit-il d’une livraison instantanée, rapide ou plutôt de modèles de point de retrait ? Comment les contraintes environnementales dans les grandes métropoles sont-elles prises en compte par les acteurs du transport et de la distribution ?

Le 6 avril à 10h, Jérôme Libeskind animera une seconde conférence sur la logistique urbaine dans les villes moyennes et les métropoles intermédiaires. Quelles sont les problématiques et les solutions dans ces territoires ? La logistique urbaine est souvent associée à Paris et aux très grandes métropoles. Pourtant, les autres agglomérations et centres villes sont aussi confrontés à des problématiques de compréhension des flux de marchandises et de verdissement des cœurs de villes. Interviendront lors de cette conférence la Ville de Dinan, Grand Besançon Métropole, mais aussi les triporteurs Malouins et Watea. Une conférence à ne pas manquer !

Le 7 avril à 13h45, la troisième conférence du cycle logistique urbaine concernera la réduction des emballages e-commerce. Quels sont les problèmes ? Quelles sont les bonnes pratiques, les solutions les plus innovantes ? Comment les transporteurs s’impliquent dans ces démarches ? Cette conférence permettra de recueillir les témoignages de TLF, L’intendance, Hipli, Université Gustave Eiffel et DS Smith.

Ces conférences seront sans nul doute des temps forts de la SITL 2022 !

Les plateformes de livraison de repas, qui connaissent une formidable croissance depuis la crise du COVID-19, sont toutefois confrontées à un modèle logistique peu performant.

Les repas sont cuisinés par des restaurateurs, qui sont pour certains totalement fermés et pour d’autres ouverts pour la livraison et le click & collect. En temps normal, ces restaurateurs supportent les charges d’un restaurant, avec une salle, des serveurs, un loyer dans une rue attractive.

Par ailleurs, les restaurants sont souvent spécialisés : pizza, burger, sushis…Commander une pizza et un burger est alors compliqué dans le même restaurant.

Les plateformes ont donc inventé un nouveau modèle, le restaurant sans salle. Les coûts de préparation des repas sont ainsi réduits et les cuisines de différentes spécialités sont regroupées. Sur le plan logistique, ces cuisines centrales peuvent préparer des tournées de livraison de repas plus facilement que des restaurants indépendants, positionnés de façon éclatée sur le territoire urbain.

Plusieurs terminologies sont en fait utilisées.

Les « ghost kitchen », ou cuisines fantômes, sont des cuisines qui ont comme unique fonction de préparer des plats remis à des livreurs. Ce concept connait un énorme succès dans plusieurs pays du monde. Leur nombre est estimé à 7500 en Chine et 1500 aux Etats-Unis. En France, ce modèle est émergent mais mérite d’être un peu mieux compris.

Les « dark kitchen » correspondent au même type d’installations mais peuvent aussi accueillir des clients qui viennent retirer leurs commandes à un comptoir de click & collect.

Derrière ce concept se cachent de nombreuses fonctionnalités qui présentent un risque pour les restaurants, mais aussi sur le plan social et environnemental.

Pour les restaurants, il s’agit d’une concurrence directe. En effet, les restaurants sont fermés alors que les dark kitchen et ghost kitchen ont l’autorisation d’ouvrir.

Mais un des sujets concerne les données. En effet, les plateformes disposent des données provenant des restaurants, notamment les noms des clients, leurs habitudes de consommation. Elles pourraient alors les utiliser pour développer ces nouveaux concepts.

Sur le plan environnemental, les dark kitchen sont souvent situées dans des emplacements assez bon marché, plus éloignés des zones de consommation que les restaurants. De ce fait, les livreurs choisissent plus facilement d’utiliser des scooters que des vélos. Le risque est alors le développement d’un modèle de livraison polluant, bruyant et accidentogène.

Sur le plan social, la livraison reste très majoritairement confiée à des livreurs auto-entrepreneurs, peu rémunérés. Le rapport réalisé par l’Université Gustave Eiffel / Ifsttar sur les livraisons instantanées à Paris est édifiant. 98% des livreurs sont des hommes, 31% des livraisons sont effectuées en scooter et 16% en Velib. 73% sont des livreurs à plein temps et 37% d’entre eux utilisent un compte en partage. Ce dernier chiffre laisse penser que de nombreuses pratiques se développent : livraison par des mineurs ou des personnes en situation irrégulière.

Ce modèle, qui se développe en dehors de toute réglementation, doit donc faire l’objet d’un encadrement réglementaire plus strtict, avant que cela ne soit trop tard pour réagir.

Cette réglementation peut concerner les sujets suivants :

  • Utilisation des données. L’utilisation des données des clients des restaurants devrait être encadrée afin d’éviter une concurrence nouvelle.
  • Ces modèles sont fortement consommateurs d’emballages jetables. A une époque de sensibilisation des consommateurs aux emballages et au plastique, une utilisation d’emballages biodégradables et d’emballages récupérables devrait être encouragée.
  • Les premières dark kitchen situées près de Paris sont mal acceptées par les riverains. Grand nombre de scooters, bruit… Nous sommes très loin de modèles vertueux sur le plan environnemental. Du fait des plaintes des riverains, certaines villes comme Nantes sont amenées à réglementer les pratiques locales.
  • De nombreux modèles que nous observons actuellement sont à l’opposé de modèles sociaux vertueux.

Le législateur pourrait alors s’intéresser à

  • mieux responsabiliser les plateformes sur leurs pratiques
  • garantir un modèle acceptable sur le plan social et environnemental
  • éviter une concurrence assez mal venue dans la période actuelle avec les restaurants.

Une option, qui pourrait être appuyée par le fait que ces plateformes utilisent largement l’espace public et les installations publiques (comme les Velib) serait d’autoriser les villes à agréer ou refuser les plateformes de livraison de repas qui interviennent sur son territoire, comme elles commencent à le faire sur les vélos et trottinnettes en free floating.

Une chose est en tout cas certaine : la loi d’orientation des mobilités, tout juste votée, est déjà dépassée !