plan de la petite ceinture en 1924

Depuis des années, différentes associations se mobilisent afin de faire revivre la Petite Ceinture.petite ceinture

Nathalie Kosciusko-Morizet a inclus dans son projet de mandature la transformation de cet axe inutilisé en piste cyclable de façon particulièrement attractive. Anne Hidalgo présente à son tour aujourd’hui son projet pour l’aménagement de cette ancienne voie ferrée.Petite_ceinture_12e

Les parisiens et amateurs de vélo ne peuvent que se réjouir de voir enfin revivre cet axe, et plus encore, de le voir transformé en piste cyclable aménagée et sécurisée, ce qui est loin d’être le cas de tous les axes cyclables à Paris.

Mais rappelons-nous l’histoire de la Petite Ceinture et son rôle majeur qui a été le sien dans la distribution des marchandises.

La Petite Ceinture a été créée à la grande époque du chemin de fer, entre 1852 et 1869. Cette rocade ferroviaire a été conçue après la réalisation des principaux axes Paris-province et des gares parisiennes,  dans les années 1840. Aucune liaison n’existait alors entre ces différents axes de circulation ferroviaire.

L’état, de même que les différentes compagnies exploitant les lignes radiales, ont financé de projet qui était à l’origine de 32 kilomètres.

Cette ligne a d’abord été conçue pour l’acheminement de marchandises et l’interconnexion des différentes lignes. Ainsi, en 1855, la Petite Ceinture, rive droite, a transporté 780 000 tonnes de fret. Le trafic voyageur sur la petite ceinture a débuté plus tard, en 1862 et a transporté 39 millions de passagers en 1900. Ce service voyageurs a perduré jusqu’en 1934, sauf sur sa partie Ouest.plan de la petite ceinture en 1924

Le développement rapide du trafic des marchandises a conduit, dès 1875, les grandes compagnies de Chemin de Fer à construire la ligne de Grande Ceinture de Paris, le réseau ferré national étant disposé en étoile à partir de Paris et la Petite Ceinture ne pouvant faire face à ces besoins de contournement et d’échange.

La Petite Ceinture a cependant continué, après 1934, à connaître une activité marchandises intense, en desservant notamment les usines Citroën de Grenelle, les abattoirs de Vaugirard, les ateliers du métro et la gare de Paris-Gobelins, cette dernière regroupant aujourd’hui essentiellement les grossistes de produits asiatiques, ceci jusqu’en 1991. La ligne comportait 5 gares de marchandises et 2 gares de triage.

Le réseau de la Petite Ceinture a été partiellement réduit à partir des années 1950 et est à ce jour incomplet.

Si les projets de transformation de cet axe ne peuvent que recueillir une adhésion, il serait dommage de ne pas conférer à cet ensemble une vocation de logistique urbaine, en complément de son objet cyclable.

Plusieurs idées peuvent alors être émises :

–          Autoriser cet axe aux cargo-cycles, mais aussi aux petits véhicules électriques de livraison urbaine (de type Goupil ou Mooville), qui roulent à une vitesse réduite et sont de faible largeur);

cargocycle

cargocycle

petit véhicule de livraison électrique urbain

petit véhicule de livraison électrique urbain

–          Profiter de cet axe et de  la présence de gares désaffectées pour créer des ELU tout le long du parcours. Ces Espaces Logistiques Urbains peuvent être de différents types : surfaces de quelques centaines de m² directement connectés à la Petite Ceinture ; surfaces partagées avec d’autres activités.

Concernant ce dernier point, nous pourrions imaginer des espaces utilisés le matin tôt pour des activités de tri de colis transportés en cargo-cycles et le reste de la journée pour des activités de loisirs, tel qu’ils sont imaginés. En effet, la logistique urbaine nécessite des surfaces en ville, mais pas nécessairement toute la journée. Les horaires de la logistique urbaine sont probablement compatibles avec d’autres activités.

Profitons donc de cette opportunité exceptionnelle de faire revivre un axe inutilisé qui contourne Paris pour y associer des initiatives de logistique urbaine !

Il est étonnant de constater que la logistique urbaine est au cœur des préoccupations des principales villes européennes. Le Bestfact Workshop, qui vient d’avoir lieu les 29 et 30 janvier à Bruxelles, a été l’occasion de faire un point sur les expériences dans de nombreuses villes européennes.cargo-cycle de la société Txita- San Sebastian

Les discours théoriques ont clairement laissé place à des expériences concrètes, ceci dans de très nombreux pays. Ces expériences peuvent être classées sous différentes formes :

1– les expériences de centres de consolidation dus à une initiative publique. les exemples présentés étaient notamment en Italie, aux Pays-Bas, en Suède et au Danemark. le projet de CDU de Bruxelles a également été cité.

2- les expériences privés de centres de distribution du dernier kilomètre en utilisant des moyens de livraison écologiques (cargocycles ou véhicules électriques). Nous avons pu assister aux présentations d’expériences dans différentes villes,  à Paris (The Greeenlink), à Londres, en Espagne et en Allemagne notamment.

3- les avancées technologiques sur les véhicules de livraisons urbaines et les initiatives de réseaux de location de véhicules électriques.

Des points communs sont apparus entre toutes ces initiatives vertueuses :

– un objectif de maîtrise du nombre de véhicules de livraison et de réduction sensible des émissions de CO2 dues à la distribution des marchandises. Les autres externalités négatives telles que bruit, particules fines, accidentologie, partage de la voirie ont été également clairement identifiées.

– une nécessité d’accompagner ces initiatives d’une évolution de la réglementation permettant à ces solutions de bénéficier d’un avantage par rapport à des solutions traditionnelles.

– l’importance de construire des solutions économiquement équilibrées.

– l’apparition de nouvelles contraintes liées aux évolution de la consommation (e-commerce notamment), qui perturbe fortement les schémas étudiés jusqu’alors autour des commerces de centre ville).

Ce workshop, qui regroupait des représentants de nombreux pays, témoigne de l’intérêt, soutenu par l’Union Européenne, pour de nouvelles pratiques de distribution des marchandises dans les villes. Il n’y a clairement pas de solution unique mais des initiatives vertueuses complémentaires qui vont dans le même sens : améliorer l’attractivité des villes.

Le baron Haussmann n’est pas nécessairement le personnage auquel on pense en premier lorsqu’on évoque l’histoire de la distribution des marchandises.

De très nombreux livres ont été écrits sur l’œuvre d’Haussmann, parfois d’ailleurs critiquée pour avoir détruit le vieux Paris et surtout pour son coût exorbitant.

Haussmann a tout d’abord agrandi Paris en y annexant des communes suburbaines.

Photo de Haussmann en 1860Il a aussi rendu Paris viable. En effet, malgré les travaux effectués sous Napoléon Ier, Paris souffrait à l’époque de problèmes majeurs d’hygiène, de sécurité, de circulation et connaissait une population en forte croissance. Il avait comme mission d’améliorer la circulation, l’hygiène et la paix sociale. Napoléon III lui a demandé plus encore, il voulait embellir Paris et faire de Paris une ville aussi prestigieuse que Londres.

Nous n’y pensons pas tous les jours, mais son apport à la capitale a été essentiel. En seulement 17 années, de 1853 à 1870, Haussmann, préfet de la Seine,  a tout fait ou presque. Jamais Paris n’avais connu et ne connaîtra probablement autant de travaux. On lui doit bien sûr les avenues, mais aussi les parcs et jardins (parc Monceau, Montsouris, Buttes-Chaumont, Bois de Vincennes, notamment). On lui doit aussi l’amélioration des voies, des pavés, des trottoirs, de l’éclairage public, les promenades, les cimetières, les lycées et collèges, les théâtres, les égouts, de nombreux édifices religieux (d’ailleurs de différentes confessions), les hôpitaux et de très nombreux édifices publics.

Mais Haussmann était également intéressé par l’approvisionnement de la capitale. Tout d’abord en eau. L’eau provenait essentiellement du canal de l’Ourcq, créé par Napoléon 1er. Les volumes étaient très insuffisants pour approvisionner Paris. Haussmann est à l’origine de travaux énormes afin d’améliorer l’approvisionnement de Paris en eau, notamment par des puits artésiens, collecteurs, réservoirs, circuits d’adduction et autres équipements.

Haussmann s’est beaucoup intéressé aux Halles. En effet, c’est Haussmann qui a convaincu Napoléon III de confier à Baltard, qui était un ancien camarade d’Haussmann au lycée…, la construction des différents bâtiments des Halles. Napoléon III voulait du fer, rien que du fer… et rêvait de reproduire la gare de l’Est. Il rêvait de « vastes parapluies «  en fer et en verre. Haussmann avait d’ailleurs eu beaucoup de difficultés à convaincre Baltard, grand prix de Rome, de construire en fer.

Mais on doit également à Haussmann les abattoirs de La Villette, reliés par un embranchement, aux Chemins de Fer de Ceinture et pas un embarcadère, au canal de l’Ourcq. La Villette était donc un site multimodal !

Haussmann est également intervenu sur les canaux, les berges de la Seine, les ponts, les gares (la gare de Lyon notamment)…

Comme durant de nombreuses périodes historiques, l’approvisionnement de la capitale constituait un enjeu majeur afin de garantir le bien-être des habitants mais surtout la sécurité.

Ainsi, Haussmann a profondément modifié les infrastructures d’approvisionnement de la capitale, notamment les voies de circulation et équipements, mais aussi l’approvisionnement en alimentation (Les Halles et les abattoirs), en eau.

Evidemment, ce petit article est loin d’être exhaustif et n’en a pas la prétention. Il peut donner envie de lire ou relire les Mémoires du baron Haussmann et je citerais une phrase qui est essentielle dans l’œuvre d’Haussmann concernant Paris.

« La facilité de ses accès est une nécessité pour toutes les productions des départements, qui affluent sur ce grand marché. La commodité des points où se concentrent les approvisionnements, où s’opèrent les transactions diverses (…) »

Haussmann n’était-il donc pas un de nos grands logisticiens ?