Élément incontournable du B to C ou du C to C, le colis constitue le dénominateur commun de la logistique.

Vendre un produit sur internet est simple. L’expédier est une toute autre aventure.

Le marchand, ou le particulier, confie son produit à un réseau industriel de transport. Ce colis va être manutentionné de nombreuses fois. Une fois lors de l’enlèvement. Une autre fois dans une agence départ, souvent dans un hub plus ou moins automatisé. Puis dans une agence de distribution, parfois dans un point relais ou un bureau de poste, et de multiples fois en cas de double ou triple présentation, en cas de retour ou de mise en souffrance.

Les transporteurs ont fait de nombreux efforts pour améliorer le soin qu’ils apportent à la manutention des colis. Nous avons pourtant tous en tête des images de colis écrasés, égarés, détériorés lors des opérations de transport.

Le soin qu’apporte l’e-marchand à bien tenir son entrepôt, à protéger ses produits, est parfois mis à mal dans la chaîne de transport, qui achemine ce produit dans un circuit de transferts multiples.

L’e-marchand, dans de nombreux cas et notamment lorsqu’il s’agit de produits fragiles, prend alors des précautions. Il choisit un carton de grande dimension, multiplie les calages à l’intérieur, avec papier froissé, film bulle, coussin d’air et autres ingéniosités permettant de protéger le produit vendu et faire en sorte que son client reçoive le produit dans de bonnes conditions. Le vendeur particulier va lui aussi utiliser tous les moyens à sa disposition, papier journal, polystyrène, carton, etc.

L’emballage est donc un problème en soi. A tel point que certaines start-ups, à l’instar de Shyp aux Etats-Unis, se sont spécialisées sur ce créneau d’emballage et d’expédition pour le compte d’e-marchands.

L’emballage, bien connu dans l’industrie, est un métier. Bien protéger le produit, mais aussi éviter les calages et cartons surdimensionnés, qui multiplient les coûts, les volumes transportés et augmente l’impact environnemental de la supply chain, constitue un enjeu majeur.

Quels sont les bons et les mauvais élèves ?

Les bons élèves sont certainement les e-marchands qui disposent de formeuses et machines d’emballage permettant le réglage du carton en fonction de la hauteur du produit. Ce réglage permet de supprimer, sauf pour des produits très fragiles, le calage intérieur et réduit le volume transporté. Il ne réduit pas de beaucoup le carton consommé, le carton étant généralement replié ou découpé. Ces machines ont été acquises par plusieurs e-marchands et prestataires, disposant de gros volumes d’expédition.

Cette réduction du volume transporté permet aussi de mieux négocier ses contrats de transport.

Le transport en enveloppes plastiques est adapté à des produits peu fragiles (vêtements par exemple) mais reste peu adapté dès lors que le produit ou l’emballage de vente présente un risque de fragilité.

De nombreux e-marchands, même parmi les plus grands, A..…, utilisent pour une part importante des colis préparés des cartons traditionnels avec calage. Ceci induit un surdimensionnement considérable,  mais aussi un coût environnemental et un volume inutile transporté qui n’est probablement pas calculé à sa juste mesure.

Colis Amazon et colis Happyview

Colis Amazon et colis Happyview

Un autre e-marchand, Happyview, spécialiste de la vente de lunettes sur internet, est certainement un des meilleurs exemples d’étude optimisée de l’emballage. L’étui à lunettes est conditionné sans calage dans un carton de seulement 16 cm x 8 cm x 8 cm, parfaitement adapté à la plupart des étuis à lunettes et qui entre facilement dans une boîte aux lettre. Les documents (ordonnance, facture, publicité) sont utilisés pour caler l’étui dans son carton. Pas de calage, un carton parfaitement optimisé, nous sommes dans une situation parfaitement maîtrisée et optimisée.

L’optimisation de l’emballage présente de nombreux avantages. L’e-marchand réduit son coût d’achat d’emballages et supprime le coût de calage. Le temps de préparation de commandes est réduit. Le colis rentrant dans de nombreuses boîtes aux lettres, l’échec à la livraison est également diminué. Le faible volume des colis permet de mieux négocier ses prix de transport. Enfin, l’impact environnemental du colis individuel est réduit.

La situation d’un étui à lunettes standardisée est probablement plus simple à gérer que le conditionnement de produits alimentaires, de décoration, de design ou d’électronique. Cet exemple montre cependant que la gestion parfaite du conditionnement d’expédition permet d’optimiser la supply chain du dernier kilomètre.

Les grandes villes françaises assistent à des modifications majeures dans la distribution.

Depuis quelques années, la périphérie connait un développement exponentiel des drives. Plus de 3400 drives solos ou accolés aux magasins ont ainsi été réalisés. En 2014, pas moins de 47 drives étaient ouverts chaque mois. Ce modèle, qui a profité d’un vide juridique permettant à des enseignes d’implanter facilement des drives à proximité de concurrents, atteint ses limites mais modifie le mode d’achat périurbain.

Drive Carrefour

Les centres villes connaissent de leur côté un changement aussi profond avec la multiplication des petits formats de vente. Monop’, Franprix, Intermarché express, Carrefour, Casino, Auchan, avec son enseigne A2Pas, Marks & Spencer, développent des concepts de magasins adaptés à la ville.

A2pas

Paris, qui était pendant longtemps dominé par 3 groupes, Monoprix (racheté par Casino), Casino-Franprix et Carrefour, devient aujourd’hui un périmètre de développement pour l’ensemble des groupes de distribution, à l’exception de Leclerc, qui continue à miser sur le secteur périurbain.

Paris a ainsi connu une augmentation du nombre de superettes de 49 entre 2005 et 2007 et de 56 entre 2007 et 2011 (source APUR). Le nombre d’ouvertures et de nouvelles enseignes depuis 2 ans laisse penser que ce taux de progression est en accélération constante.

Les raisons de ce phénomène sont multiples.

Tout d’abord, les centres villes retrouvent progressivement une certaine attractivité. De nombreuses villes comme Toulouse, Bordeaux, Montpellier ou Nantes, voient leur population urbaine augmenter à nouveau, après des décennies de déclin au profit de la périphérie. Paris a gagné 50 000 habitants depuis 2010, mais reste très en deçà de la population qui était celle de la capitale il y a un siècle.

La population urbaine n’est plus la même. Certains quartiers accueillent une population active urbaine, les fameux bobos. D’autres quartiers regroupent les segments les plus pauvres de la population. Ainsi, l’INSEE nous indique que 20% de la population habitant en centre-ville ont un niveau de vie inférieur au seuil de pauvreté. La population urbaine est de moins en moins motorisée. Le clivage entre population urbaine qui fait généralement ses achats à pied et population péri-urbaine multi-motorisée habituée aux centres commerciaux est de plus en plus présent.

Ces petits formats de vente urbains permettent de pourvoir aux besoins d’achats discount et aux modèles actuels de points de proximité de type snacking.

Les amplitudes horaires sont de plus en plus larges tant le soir que le week-end.snacking

L’étroitesse de ces formats de vente nécessite un approvisionnement quotidien. Certains points sont même approvisionnés deux fois par jour, le modèle se rapprochant de celui des pharmacies.

Autre phénomène, les livraisons à domicile continuent de se développer rapidement, aidées par une politique commerciale agressive des enseignes.

Ce développement des petites surfaces de vente de l’ordre de 100 m² ou moins, qui apportent aux habitants un service de proximité, nous rapproche de l’histoire des villes, qui ont connu de nombreuses enseignes aujourd’hui disparues, telles que Felix Potin, la Laiterie Parisienne, Goulet-Turpin, Familistère ou Radar.magasin  Felix Potin des annees 70

L’évolution actuelle des petits formats s’apparente ainsi à un retour vers le passé, et une économie de proximité qui prend le dessus sur une économie du prix le plus bas. C’est probablement une bonne nouvelle.

Ce sujet et son histoire est détaillé dans mon livre « La Logistique Urbaine – les nouveaux modes de consommation et de livraison » Editions FYP. Bonne lecture !

livre logistique urbaine

A 6 mois de la conférence COP 21 sur le climat, force est de constater que les efforts sur le climat portent plus souvent sur les commissions, débats et discussions que sur des actes concrets.

La transition énergétique, objet de plusieurs lois, dont celle récemment votée, ne serait-elle qu’une occasion de montrer des volontés générales ?

Force est de constater qu’en ce qui concerne la Logistique Urbaine, de nombreuses start-ups créatrices de solutions innovantes et vertueuses, peinent à se développer et à survivre.

Souvent pionnières, basées sur la technologie, elles fondent leur modèle de développement sur la mise en pratique rapide des décisions politiques et un réel changement de comportement des utilisateurs et des consommateurs. Mais ce changement se fait attendre…

Le dernier épisode de cette série, qui a connu de nombreuses expériences parfois douloureuses, est la mise sous protection judiciaire de la société Muses.

Remarquable exemple français de production industrielle de véhicules électriques de livraison, sous la marque Mooville, cette société fait face à des difficultés notamment commerciales.

Malgré des clients prestigieux comme La Poste, Chronopost ou DHL, son carnet de commandes n’est constitué que d’une dizaine d’exemplaires alors que sa chaîne de production est prévue pour 250 véhicules par an.

Véhicule Mooville présenté à la SITL 2015

mooville chronopost

La société Muses se situe pourtant dans la droite ligne de la transition énergétique dans les transports. Passer du diesel à l’électrique, permettant ainsi de réduire les émissions de particules et de CO2, constitue un enjeu reconnu par tous. Bien évidemment, même si Muses a tout fait pour rendre l’électrique abordable, le surcoût par rapport au diesel existe et freine les prises de commandes.

Maîtrisant le calendrier de cette transition énergétique, l’Etat a donc une responsabilité directe dans l’aide à la survie et au développement de ces initiatives industrielles qui vont dans le sens de la loi sur la transition énergétique.

L’aide de l’Etat peut avoir différentes formes.

L’aide financière directe est une solution, même si elle reste difficile en période de restrictions budgétaires et très aléatoire.

Le principal levier est de permettre aux opérateurs qui font le choix de ces véhicules innovants de disposer d’avantages par rapport aux autres, notamment sur la productivité quotidienne de leur travail de transporteur.

Autoriser les véhicules électriques sur les voies réservées est une priorité absolue, permettant à ces opérateurs de rouler plus vite en électrique qu’en diesel et d’effectuer plus de positions par jour. La voie réservée sur l’A1, dont la Logistique Urbaine est le grand oublié, est un excellent exemple concret.

Disposer d’avantages sur le prix de l’électricité est également un levier possible. Des leviers fiscaux peuvent également être étudiés dans ce cadre.

L’installation de prises rapides dans les villes ne constitue qu’un des éléments permettant le développement de véhicules de livraison électriques. Il est loin d’être suffisant.

Mon livre « La Logistique Urbaine – les nouveaux modes de consommation et de livraison », paru aux Editions FYP, étudie les possibilités dont dispose l’Etat et les collectivités locales pour permettre la mise en pratique la transition énergétique dans les livraisons urbaines.

livre logistique urbaine

L’exemple de Muses, qui constitue un des symboles de la filière industrielle française de véhicules de livraison électrique, doit nous faire réagir et nous faire comprendre l’urgence qu’il y a à trouver des solutions de compétitivité de la livraison en véhicule électrique.

Passer de la théorie à l’action afin de réussir la transition énergétique est là l’enjeu des prochains mois avant la COP 21.