Quand nous parlons du dernier kilomètre et d’environnement, tous les voyants virent au rouge. L’e-commerce génère de plus en plus de colis, livrés de façon anarchique dans les villes, souvent avec des stationnements en double-file. Les magasins sont livrés de plus en plus fréquemment, du fait du cross-canal, mais aussi d’une gestion plus optimale des surfaces de ventes et des stocks. Les repas sont livrés par une myriade de vélos et scooters roulant de plus en plus vite, trop souvent sans respecter les règles de sécurité de base. Les sites internet nous proposent des livraisons en 1 ou 2 heures, effectuées par des coursiers, le plus souvent motorisés. Les livraisons à domicile connaissent une croissance exponentielle.

Ces flux ne sont pas tous nouveaux. Ainsi, les livraisons à domicile existent depuis fort longtemps. Les grands magasins en faisaient déjà au 19ème siècle un de leurs arguments de vente, ceci bien avant l’invention du marketing.

Mais leur développement rapide perturbe les schémas en place dans les villes et l’organisation de la mobilité des marchandises.

Pourtant, d’autres nouvelles nous semblent aller dans le bon sens, au moins sur le plan environnemental. Sur le plan culturel ou affectif, cela semble moins sûr. Elles concernent en fait principalement la réduction de certains flux transportés, et donc le nombre de véhicules sur la route.

Le premier segment touché par l’économie numérique est le courrier. Son déclin de 7% par an participe à la réduction des flux de véhicules dans les agglomérations. Il en est de même pour les autres produits progressivement dématérialisés, la musique, les cassettes vidéo, les livres, les journaux, la photo, les archives et autres documents papier… Autant de secteurs qui évoluent profondément et qui tendent à disparaître sur le plan matériel. Si nous voyons avec tristesse disparaître livres, disques et journaux, réconfortons-nous en pensant aux arbres économisés et aux camions en moins sur nos routes ! Nous pleurons probablement moins la disparition des relevés de banque et les avis d’imposition !

Mais la réduction des volumes transportés ne s’arrête pas là. Les progrès technologiques permettent de réduire sensiblement les emballages. C’est ainsi le choix fait par Cdiscount en équipant ses entrepôts de la toute nouvelle machine d’emballage CVP-500 de Neopost, qui découpe et ajuste le carton de tous les côtés afin de réduire le volume du colis transporté. Cette machine d’emballage a été récemment primée au Prix Stratégies Logistique de l’innovation durable.

Dans d’autres domaines, le développement progressif des imprimantes 3D permet de réduire le transport de certaines pièces, fabriquées localement. Les applications actuelles des imprimantes 3D se retrouvent actuellement dans de nombreux secteurs tels l’automobile, la plasturgie, l’aérospatiale, l’électronique, le médical. La croissance du marché des imprimantes 3D est de 70% par an. En 2016, il s’est vendu dans le monde 278 000 imprimantes 3D de bureau et 12500 machines industrielles. En mai prochain aura d’ailleurs lieu le premier salon de la fabrication additive à Paris.

Ces 3 exemples montrent que les principaux axes de progrès afin de réduire le nombre de produits transportés sont la dématérialisation, la mécanisation permettant de réduire les volumes des emballages, la fabrication additive permettant de réaliser sur place les produits nécessaires et de ne transporter que des matières premières.

L’impact du progrès technologique sur l’environnement est alors une réalité !

La publication récente du document cadre pour une Stratégie Nationale France Logistique 2025, qui fait suite à la conférence nationale Logistique du 8 juillet 2015, met en exergue pour la première fois les problématiques et orientations nationales pour la Logistique Urbaine.

Habituellement, il est considéré que la Logistique Urbaine est un sujet de préoccupation locale. La loi pour la transition énergétique du 18 août 2015 donne d’ailleurs des pouvoirs aux collectivités locales dans ce sens, notamment de création de Zone à Circulation Restreinte.

Le cadre national établit ses objectifs à partir de 4 scenarios macro-économiques très différents, allant d’une poursuite de la mondialisation au retour des frontières. C’est le cadre politique et économique dans lequel les projets s’intègrent. La logistique urbaine et le dernier kilomètre ne font pas exception.

Il est ensuite proposé une impressionnante liste, sur 30 pages, d’objectifs à 10 ans. Pas moins de 246 objectifs ! L’ambition de ces objectifs montre l’importance portée à la logistique et nous ne pouvons que nous en féliciter, même si la marche peut sembler haute.

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Ce blog a déjà parlé à plusieurs reprises du problème essentiel des centres villes en France ou en Belgique et de leur désertification. Le récent livre d’Olivier Razemon « Comment la France a tué ses villes » explique ce phénomène, ses origines et ses conséquences notamment politiques.

A l’initiative de l’Association des Petites Villes de France (APVF), les candidats sont invités à se prononcer sur les mesures qu’ils envisagent de prendre afin d’enrayer ce phénomène, qui dépasse très largement le sujet du commerce. Il touche au mode d’habitat, de déplacements et à la politique publique de développement des zones périphériques. L’APVF vient de publier un manifeste proposant 17 axes de travail. Dans un de ces chapitres dénommé « la revitalisation des centres-bourgs, une politique globale », l’APVF propose de  » de mobiliser tous les acteurs du centre-ville dans le cadre d’une gouvernance partagée, afin de mieux coordonner les interventions, mettre en valeur l’offre commerciale existante, organiser des animations, ou encore créer des services pour l’ensemble des commerçants d’un secteur (plateforme internet, logistique urbaine, livraison…)  » . La logistique urbaine est donc dans la campagne !

Pour choisir un exemple des problématique des petites et moyennes villes, nous allons nous arrêter dans une agréable ville de près de 10 000 habitants du cœur de l’Hérault, Clermont l’Hérault, et tenter d’expliquer ce phénomène. Clermont l’Hérault vit au rythme de son marché, le plus ancien du Languedoc, qui étale ses nombreux producteurs et commerçants tous les mercredis matin dans l’ensemble du centre-ville. Une magnifique expérience et un lieu prisé des touristes en période estivale.

Mais cette jolie ville de l’Hérault n’en est pas moins une ville déserte. La rue centrale se vide progressivement de ses commerces. les commerces de vêtement meurent tout doucement, comme les fromagers, les épiciers ou opticiens.

  

  

  

 

Depuis plusieurs années, le centre-ville est progressivement déplacé vers un second centre-ville, à quelques kilomètres seulement, la zone des Tannes-Basses. Sous prétexte de créations d’emplois, qui ne sont en fait que des transferts, une immense zone multi-commerces, qui n’a rien d’artisanale, a été créée à l’entrée de la ville. On y trouve logiquement un supermarché et sa galerie marchande, les nombreuses enseignes de vêtements, de bricolage et de sport auxquelles nous sommes habitués, mais surtout des activités que l’on retrouve habituellement dans un centre- ville : boulangerie, notaire, banque, dentiste, boucherie, fleuriste.

   

Cet exemple, que nous pouvons retrouver dans de nombreuses villes françaises, montre que le choix a été fait de créer une seconde centralité, en concurrence avec le centre-ville historique, mais totalement et uniquement accessible en voiture. Les habitants des différentes localités et lotissements de la région peuvent ainsi effectuer la totalité de leurs achats sans avoir à aller au centre-ville, qui n’offre des facilités nécessaires qu’au travers de commerçants ambulants le mercredi matin…

Non loin de là, l’urbanisation a encore marquée la région avec la toute nouvelle zone logistique de la Salamane, qui ne rassemble en fait que 2 entreprises, un entrepôt régional de la centrale d’achat U, totalement isolé des autres zones logistiques de la région et un drive Leclerc, un des 3000 drives français.

 

Olivier Razemon nous explique que le responsable de la désertification des centres villes n’est pas l’e-commerce, qui ne représente aujourd’hui, malgré sa croissance, que 6,6% de la consommation. Le responsable est certainement la politique publique qui a permis le développement de ces zones périphériques au détriment de la ville historique. C’est aussi le consommateur, qui fait le choix d’éviter d’aller au centre-ville. Une des conséquences sur le plan logistique est l’étalement des flux, comme l’étalement des populations. Un centre-ville permet de mettre en place une concentration géographique des flux de personnes et de marchandises , ainsi qu’une proximité des habitants, qui peuvent alors s’y approvisionner à pied ou être livrés par des moyens simples. Une zone périphérique nécessite un approvisionnement en poids lourds, une mobilité en voiture et de lourdes et coûteuses infrastructures.

Un des enjeux des prochaines années sera de trouver le moyen, notamment par une politique fiscale, de faire revenir ce notaire, cette boulangerie, ce boucher ou ce fleuriste là où leur fonction première les attend, le centre-ville…