Comme chaque année, le blog Logicités met en évidence 5 mauvaises nouvelles relevées durant l’année écoulée et 5 bonnes nouvelles concernant la logistique urbaine.

L’an passé, les 5 mauvaises nouvelles présentées étaient :

  • L’explosion de la vacance commerciale dans les centres villes
  • La pollution de l’air s’aggrave dans les grandes agglomérations
  • La difficulté du modèle du CDU
  • L’arrêt du train Monoprix pour desservir les magasins parisiens
  • L’accélération de l’atomisation des flux

Malheureusement, ces 5 mauvaises nouvelles de 2016 sont restées très présentes durant l’année 2017. Dans la continuité de 2016, les 5 faits qui nous semblent avoir marqué l’année 2017, comme mauvais signaux pour la logistique urbaine sont :

  • 2017 : l’année la plus chaude de l’histoire

Hormis les phénomènes particuliers comme ceux d’El Nino, 2017 sera l’année la plus chaude de l’histoire. A tel point qu’on ne parle plus de limiter le réchauffement climatique à 1,5°C ou 2°C. Certains parlent déjà de 3°C. Les conséquences de ce réchauffement climatique sont dramatiques : ouragans, cyclones, tempêtes, inondations, incendies, réfugiés climatiques. La liste des événements climatiques de 2017 est longue et restera dans les mémoires. Harvey, Irma, Jose, Maria… Les noms s’égrènent et sèment leur lots de désolations. Le coût des catastrophes naturelles était en 2017 de 273 milliards €, qui a été pour les assureurs la seconde année la plus élevée de l’histoire après 2011 (Fukushima). En juin 2017, malgré la réalité des faits, le président américain a décidé le retrait des Etats-Unis des accords de Paris. Grave décision, non seulement pour les générations futures, mais d’ores et déjà pour les habitants de nombreuses régions du monde touchées par des phénomènes climatiques exceptionnels.

 

Le transport de marchandises est un des secteurs fortement générateurs d’émissions de gaz à effet de serre. L’amélioration du bilan de ce secteur est une nécessité afin de respecter les engagements des accords de Paris : baisse de 40% des émissions de GES en 2030 par rapport à 1990. Nous en sommes bien loin.

  • 500 000 morts par an en Europe du fait de la pollution de l’air

Les chiffres de l’Agence Européenne de l’Environnement impressionnent. Les polluants les plus nocifs sont les particules fines (notamment les PM 2,5), le dioxyde d’azote (NO²) et l’Azote (O3). Le transport des marchandises et notamment le diesel a une importante part de responsabilité dans ces chiffres. Il y a donc urgence à transformer les modèles de transport de marchandises afin de réduire ces émissions de polluants locaux. Les villes européennes ne sont pas les seules touchées dans le monde, loin de là. La revue médicale britannique The Lancet estime que 16% de la mortalité dans le monde est due à la pollution de l’air, de l’eau, des lieux de travail. La pollution de l’air serait à elle seule responsable dans le monde de 6,5 millions de décès. Elle n’est pas nouvelle. Déjà au 19ème siècle, les villes étaient particulièrement polluées, mais ce qui est nouveau, c’est la mesure, donc la prise de conscience de l’effet de l’homme sur sa propre santé.

 

  • L’énorme facture de l’abandon de l’écotaxe

La facture de l’abandon de l’écotaxe s’élève à près de 1 milliard €, ce chiffre ne prenant pas en compte les recettes prévisionnelles annuelles de 1,15 milliard € (dont 20% pour Ecomouv) qui feront défaut. Sur 10 ans, ce sont 10 milliards € qui manqueront au financement des infrastructures de transport. Ces infrastructures vieillissantes (réseau ferroviaire, canal Seine-Nord Europe) ou à créer (réseau de bornes rapides de charge électrique) nécessitent des investissements considérables. L’écotaxe, dont on peut critiquer le montage, la technologie peut-être dépassée, la raison d’être, a été votée par le parlement et aurait dû être mise en service. Peut-être le sera-t-elle sur des tronçons régionaux ou des autoroutes de contournement d’agglomération, ainsi que le propose le rapport de Terra Nova sur le dernier kilomètre et le demandent certaines régions.

L’heure n’est plus à la polémique, mais à la recherche de solutions pragmatiques permettant de financer les infrastructures pour la transition énergétique.

 

  • Les livraisons instantanées explosent

Auparavant réservées à des livraisons spécifiques et urgentes, les livraisons instantanées dans les grandes villes marquent en 2017 une étape. Livrer vite correspond à un nouveau service qui apporte une pertinence commerciale. Sur le plan environnemental, le sujet est plus complexe car il touche directement à 2 aspects du transport : la mutualisation des livraisons et le modèle social. Plus on livre des petits volumes rapidement, plus il est difficile de constituer des tournées de livraison, donc d’optimiser les chargements. Il s’agit alors de livraisons fragmentées et effectuées avec des moyens légers et rapides, souvent des scooters. L’impact environnemental, mais aussi sur l’accidentologie, des livraisons instantanées est assez mal connu ; la question se pose de l’impact de ces livraisons sur la ville. Ce sont en effet plus de scooters, parfois de vélos ou de petits VUL, soumis à des contraintes de livraison très fortes.

Sur le plan social, la livraison de repas à vélos semble avoir atteint en 2017 une étape avec la mise sur le devant de la scène de modèle social dégradé. Nous devrons nécessairement trouver un équilibre afin de livraison à vélo soit synonyme de pertinence environnementale et pas de rabais social.

 

  • L’arrêt du CDU de Saint-Etienne

Ce mauvais signal n’a évidemment pas le même niveau d’importance que ceux mentionnés en premier dans cette liste. La ville de Saint-Etienne est une ville pilote sur le plan des expériences de logistique urbaine. Elle fait des efforts considérables afin de réduire l’impact des livraisons de marchandises. Une de ces réalisations est la mise en place d’un Centre de Distribution Urbaine.  Les études de ce CDU ont démarré dès 2009 et ont abouti à une mise en service en juin 2013. Exploitant un bâtiment de 2500 m², ce CDU, qui comprenait à l’origine de nombreux partenaires publics, mais aussi la FNTR, TLF et le pôle d’échanges Logistique 42, avait comme objectif de consolider les flux de différents messagers afin de réduire l’impact environnemental du transport. Ce CDU a fait l’objet au démarrage d’importantes aides publiques, du FEDER, de la Métropole, de la Région, de l’Ademe, de la Ville notamment.

Ce CDU a malheureusement fermé fin 2017, faute d’avoir trouvé la rentabilité nécessaire et d’avoir pu convaincre les principaux transporteurs de son efficacité. Ce blog s’est déjà fait l’écho de différentes analyses sur le modèle du CDU, qui reste complexe, imposant des coûts supplémentaires de rupture de charge et une mutualisation de flux de sociétés concurrentes entre elles. Les conditions de réussite sont nombreuses et imposent de mettre en place de tels modèles avec prudence. La consolidation des flux reste toutefois l’axe central de la logistique urbaine, le CDU n’étant qu’une des solutions possibles.

L’arrêt de ce CDU reste une mauvaise nouvelle alors qu’il était porteur d’espoir sur l’expérimentation d’un modèle.

En 2016, les 5 bonnes nouvelles mises en évidence dans ce blog étaient :

  • Franprix double le nombre de conteneurs sur la barge desservant Paris
  • Les travaux du canal Seine-Nord sont annoncés pour début 2017
  • Le GNV est devenu incontournable dans la logistique urbaine
  • La logistique urbaine se robotise
  • Les villes s’activent dans la mise en oeuvre d’une politique de logistique urbaine

La seule fausse bonne nouvelle était celle du canal Seine-Nord Europe. Un compromis sur le financement a toutefois été trouvé en octobre. Soyons donc optimistes sur la construction de cet ouvrage qui permettra de réduire sensiblement le nombre de camions sur la route.

Pour 2017, nous avons choisi les 5 nouvelles suivantes :

  • Les Assises Nationales de la Mobilité : un débat exceptionnel

Ce formidable débat public, qui annonce une prochaine loi d’orientation des mobilités, avait une spécificité qui est une première en France. La mobilité ne concerne pas uniquement les personnes, mais aussi les marchandises. La place réservée à la logistique urbaine ne devait être qu’un strapontin dans ces débats. La mobilisation des différents acteurs, fédérations professionnelles, associations, experts, ont fait que ce strapontin est devenu un siège bien ancré dans le débat national.

La logistique urbaine a enfin sa place dans les politiques publiques et c’est un très grand pas un avant.

  • L’offre de véhicules électriques de livraison devient une réalité

Jusqu’à présent, l’offre de véhicules électriques de livraison se limitait essentiellement à quelques modèles de VUL de 3 voire 4 m3. Il s’agit essentiellement du Kangoo ZE utilisé notamment par La Poste. Le segment des VUL de 8 à 14 m3, qui représente pourtant l’essentiel des véhicules de livraisons dans les centres urbaines, trouvait peu d’offres attractives sur le marché. En 2017, cette situation a clairement changé. Des constructeurs comme notamment Renault (Master ZE), Ford, Mercedes, VW (e-Crafter), DHL (véhicule Street Scooter), Voltia-Nissan (véhicule maxi 8 m3), Colibus, Gruau (Electron II), BD (Tip Trailer), proposent différents modèles sur le marché. Une offre plus large de véhicules permettra de faire de la livraison électrique un standard dans les cœurs de villes.

  • Vacance commerciale dans les centres villes : une timide prise de conscience

Après des années de constatation des résultats d’une politique publique menant à une situation critique dans de nombreuses villes moyennes, avec des taux de vacance commerciale en augmentation rapide, il faut souligner l’étape franchie en 2017. Le plan de revitalisation des villes moyennes, sur 5 ans, est une bonne nouvelle, même s’il n’est pas accompagné d’un gel des extensions commerciales comme dans certains pays. Cette prise de conscience est une étape nécessaire et constitue une bonne nouvelle. Jusqu’à présent, cet accroissement de la vacance commerciale en centre-ville est analysé comme une conséquence de décisions d’urbanisme, un développement de zones périphériques tant commerciales que d’habitat. Mais il ne s’agit probablement que du début d’un phénomène beaucoup plus large. La transformation du commerce par l’e-commerce et le cross-canal, la digitalisation de nombreux secteurs aura nécessairement pour conséquence de nombreuses fermetures de surfaces commerciales, tant en périphérie des villes qu’en centre-ville. La bonne nouvelle reste toutefois cette prise de conscience par les pouvoirs publics.

  • Le tramfret : une expérimentation pleine de potentiel

En 2017, un premier tramfret en France a été expérimenté à Saint-Etienne. Le partage des moyens entre mobilité des personnes et mobilité des marchandises offre un potentiel important dans de nombreuses villes afin de réduire le nombre de camions et les externalités négatives induites. L’expérience de Saint-Etienne, unique en France, montre que c’est possible. Les solutions de partage ne seront pas les mêmes dans toutes les villes mais les réseaux de transport public de personnes, les véhicules eux-mêmes, offrent un potentiel de partage qu’il convient de mettre en valeur.

Ce sujet de partage des moyens passagers / marchandises est un de ceux abordés lors des Assises Nationales de la Mobilité.

expérimentation du tramfret St Etienne

  • La cyclo-logistique gagne ses lettres de noblesse

Depuis longtemps, les villes rêvent de livraison à vélo, en modes doux, pour désengorger les centres. On ne peut pas parler de cyclo-logistique sans évoquer les 23 000 vélos utilisés par la Poste. Mais ce sont aussi de nombreuses petites entreprises, dans la plupart des villes, qui ont choisi d’apporter des solutions propres de livraison du dernier kilomètre : vélos-cargos, cargocycles, vélos-remorques, biporteurs, triporteurs, quadricycles, etc. Les solutions sont nombreuses et commencent enfin à être reconnues. Certaines villes comme Paris, ont mis en place des aides pour l’acquisition de tels matériels. La cyclo-logistique est présente dans les débats, comme lors des Assises de la mobilité. Le projet de La Boîte à Vélos Paris a été retenu pour fédérer sur un espace les différents acteurs de la cyclo-logistique. Il s’agit d’une étape importante afin que la cyclo-logistique ne soit pas seulement une image marketing mais aussi une réalité économique.

Bonne et heureuse année 2018 !

Comme pour nombre d’entre nous, la fin de l’année est l’heure d’un bilan. Logicités n’échappe pas à la règle. Une des missions de Logicités est de partager la connaissance et les expériences autour de la logistique urbaine, du dernier kilomètre et des livraisons e-commerce.

L’année 2017 marque clairement une étape dans la prise de conscience des enjeux de la logistique urbaine. De nombreuses agglomérations et entreprises sont conscientes de la nécessité d’agir. Les initiatives ont été nombreuses et nous prendrons le temps nécessaire, dans un prochain article, pour faire le bilan de ces actions.

Le blog Logicités, disponible sur le site web www.logicites.fr est un des outils de partage mis en place. En 2017, 28 nouveaux articles ont été publiés sur ce blog mais aussi au travers de la newsletter de la logistique urbaine et du dernier kilomètre.

Les 5 articles les plus lus sur ce blog durant l’année ont été :

Le site web Logicités a été consulté dans 109 pays en dehors de la France, notamment la Belgique, le Maroc, les Etats-Unis, le Royaume-Uni, l’Allemagne et la Suisse. Merci à tous les lecteurs du blog Logicités. Le site web Logicités publie aussi ds nombreuses informations concernant la logistique urbaine : calendrier des événements, articles de presse, vidéos, etc.

Logicités tient à remercier tous ses lecteurs.

Logicités a également été actif dans de nombreuses conférences, ateliers et tables-ronde. Jérôme Libeskind, fondateur de Logicités, a été à la fois modérateur de table-ronde, animateur de workshops, de séminaires, participant à des tables-rondes, conférencier, en français et en anglais. Ainsi, Logicités a été actif dans 23 évènements durant l’année 2017, soit 2 par mois, à Paris, mais aussi dans de nombreuses villes : Montpellier, Marseille, Le Mans, Alès, Hambourg, Agadir…

Durant cette année 2017, Logicités a participé à de nombreux groupes de travail, avec l’Aslog, durant les Assises de la Mobilité, la préparation de la SITL 2018, le Programme National Marchandises en Villes, pour ne citer que quelques-unes des instances dans lesquelles Logicités est actif. Jérôme Libeskind a participé au jury du prix SLID organisé par Stratégies Logistique et Premium Contact.

La formation et le partage fait aussi partie des actions de Logicités. Un programme de formation sur 2 jours a été mis en place avec Lamy Formation et sera renouvelé en 2018. Une formation sur une journée sera organisée en 2018 à Paris, Lyon et Lille avec Aftral. Jérôme Libeskind assure le cours de livraison urbaine et omnicanal à l’Ecole Supérieure des Transports depuis plusieurs années et est intervenu au CNAM et à Mines Paris Tech.

Parallèlement, Logicités a été impliqué dans plusieurs études publiques. Citons l’étude sur le marché du colis transfrontière pour les besoins du e-commerce (Arcep et DGE, étude réalisée avec PMP), l’étude de logistique urbaine et commerces dans l’agglomération du Mans (DDT, étude réalisée avec Samarcande), l’étude en cours sur les enjeux de la livraison du dernier kilomètre sous forme mutualisée et collaborative (DGITM, étude réalisée avec PMP-LAET et ELV Mobilités), l’étude en cours sur la logistique du dernier kilomètre, l’e-commerce et les leviers d’action dans les centres villes et centres bourgs (DREAL Pays de la Loire, étude réalisée avec Samarcande), l’étude d’impact du bateau de logistique urbaine (EPT 12, avec Samarcande et Egis).

Les 2 études sur le marché du colis transfrontière et sur la logistique urbaine au Mans sont téléchargeables sur le site www.logicites.fr.

Dans les domaines de la logistique urbaine et du dernier kilomètre, Logicités est devenu un acteur reconnu qui intervient sur de nombreux sujets d’intérêt public.

Logicités, qui apporte une vision très opérationnelle de la logistique urbaine, a également accompagné de nombreuses entreprises dans leurs problématiques logistiques : compréhension du e-commerce et des enjeux, étude de pré-commercialisation ou de commercialisation, étude de mise en place d’une solution de livraison du dernier kilomètre, étude de mutualisation de flux d’un marché de gros, assistance commerciale d’entreprises dans le domaine de la logistique urbaine, benchmark international de solutions de livraison urbaine, suivi des évolutions de la consommation. Cette assistance est ponctuelle ou sur la durée, en fonction des objectifs. Elle peut avoir une vision stratégique, prospective ou directement opérationnelle. Logicités est ainsi le partenaire de groupes immobiliers, d’opérateurs de transport et logistique, de groupes industriels ou de distribution, de start-ups.

En 2018, Logicités continuera cet accompagnement de structures publiques et privées dans le domaine de la logistique urbaine et du dernier kilomètre. Logicités orientera son action sur plus de publications, notamment en anglais, plus d’actions internationales et plus de formations. Bonnes fêtes à tous !

« On sait que, faute d’avoir pensé un urbanisme commercial à la bonne échelle, on a laissé se constituer dans leur périphérie des centres commerciaux trop importants. Le cœur de ces villes tend donc à se vider de ses commerces ». Emmanuel Macron, Révolution, p.159

Emmanuel Macron n’a pas tardé à mettre en pratique ces paroles, que beaucoup d’entre nous partagent. Le gouvernement s’est ainsi délocalisé à Cahors sans autre objectif que d’apporter une réponse à ce problème.

« Notre pays est confronté depuis des années à des vitrines fermées, des immeubles dégradés, des rues délaissées qui nourrissent un sentiment d’abandon aux lourdes conséquences ». Edouard Philippe.

Le plan en faveur des villes moyennes annoncé par gouvernement correspond à la réponse apportée par l’exécutif. Il est à la fois ambitieux sur le plan économique, mais très prudent sur le plan des changements de mode de fonctionnement.

5 milliards € pour les villes moyennes, cela constitue sans aucun doute une manne qui sera convoitée par de nombreux territoires. Mais le constat effectué par Emmanuel Macron est-il vraiment un problème d’argent et de priorités financières ?

C’est loin d’être aussi simple.

Tout d’abord, l’étalement commercial est intimement lié à l’étalement urbain. Il correspond à un modèle d’habitat et de mobilité fondé sur la voiture individuelle, donc extrêmement énergivore. Il nécessite la construction de réseaux, de routes, de transports de commun, qui vont de plus en plus loin dans la périphérie des villes. La consommation des terres agricoles et l’étanchéification des terrains produit d’autres conséquences environnementales. L’étalement urbain n’affiche aucun ralentissement dans la plupart des villes françaises. Tous les 10 ans, c’est un département qui est consommé par l’étalement urbain. Les villes et villages sont pour nombre d’entre eux touchés par ce phénomène. Les raisons sont multiples : modèle d’habitat individuel, coût bas de l’habitat périphérique, coût de l’énergie assez favorable. Pour faire revenir les commerces en centre-ville, il faut probablement y faire revenir aussi les habitants, donc freiner l’étalement urbain. Cela passe par l’urbanisme, mais surtout par une volonté locale, souvent absente, au profit d’intérêts à court terme.

Un autre sujet n’est pas évoqué. Et pourtant, il risque de devenir très présent sur les territoires lors des prochaines années. Si les surfaces commerciales périphériques se sont accrues trois fois plus vite que l’augmentation du PIB, ce sont également les premières touchées par les évolutions de la consommation. La digitalisation de nombreux secteurs et l’e-commerce auront des conséquences importantes sur ces zones périphériques dans les toutes prochaines années. Dans certaines villes, les zones périphériques connaissent déjà des taux de vacance plus importantes qu’en centre-ville. Les « dead malls », centres commerciaux vides, ne sont pas encore aussi présents en France qu’en Chine ou aux Etats-Unis mais la tendance inquiète nombre de professionnels. Après la « France moche », ce sera peut-être dans certaines agglomérations une « France encore plus moche » couverte de friches commerciales.

Le gouvernement a refusé un moratoire sur la création de zones commerciales en reportant ce sujet sur les mairies. Le ministre Jacques Mézard a d’ailleurs indiqué qu’il « souhaite donner aux élus plus de latitude ». Cela montre toute l’ambiguïté des prises de décisions publiques, laissant ainsi aux collectivités locales et aux CDAC le rôle de maîtriser l’évolution, dont nous voyons pourtant les résultats. Le fonctionnement même de la CDAC devrait probablement être revu, afin qu’il ne soit pas une simple chambre d’enregistrement de décisions déjà actées. Dans nombre de villes françaises, la désertification des commerces en centre-ville, souvent repositionnés en périphérie, mais aussi des activités de service (cabinets médicaux, notaires, services publics, etc.), est une conséquence de décisions locales.

Le rôle du Maire, certes essentiel, n’est évidemment pas exclusif et est très hétérogène. La responsabilité des distributeurs n’a pas toujours été citée. Or elle joue un rôle fondamental. Le récent exemple du Maire de Boulogne-sur-Mer, qui a décidé de financer une campagne publicitaire contre un distributeur, H & M, qui a décidé de quitter le centre-ville, est caractéristique de la prise de conscience de certains maires qui n’acceptent plus cette situation et ont décidé de réagir.

Campagne d’affichage de la mairie de Boulogne-sur-Mer

Il manque probablement dans ce plan un cadre juridique, comme il existe en Grande-Bretagne ou en Allemagne, qui freine le développement de l’urbanisme commercial en périphérie et permet de favoriser le développement commercial en centre-ville. Le levier fiscal pourrait aussi être utilisé.

Bonne nouvelle toutefois, le plan évoque le sujet des services publics, parfois les premiers à se délocaliser en périphérie.

Mais le centre-ville peut retrouver, au travers de l’e-commerce, une nouvelle fonction. La véritable market place locale, c’est celle du centre-ville, qui dispose de nombreux atouts pour constituer un pôle d’attraction des activités et permettre la réduction de la dépendance à la voiture individuelle. La numériser est un atout, qui ne semble pas apparaître dans le plan. Pouvoir développer des plates-formes numériques de commerces de proximité constitue un enjeu majeur pour les centres villes.

Ce plan est toutefois le premier sur ce sujet essentiel. Laissons-lui l’opportunité de réussir et de responsabiliser les acteurs, notamment locaux.

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